Au cours des trente dernières années, la créatrice chinoise Heyaner s’est engagée à développer un micro-écosystème en mode circulaire pour réutiliser le textile naturel.
Grâce à sa marque Mengjinongga, elle met en avant l’utilisation de chutes de tissu récupérées, tout en aidant les femmes d’un village en Chine à régénérer des revenus.
Il y a trente ans, lorsqu’Heyaner a lancé sa première marque B-Y-B-Y, elle utilisait des tissus naturels et précieux. Au lieu de jeter les chutes de tissu après le découpage, elle a pris la décision de les conserver, remplissant ainsi progressivement son entrepôt de ces matières premières précieuses. Cependant, elle ne savait pas comment utiliser ces chutes.
En 1994, lors de ses voyages dans des régions reculées comme le Guizhou, le Yunnan et le Tibet, Heyaner a découvert une pratique traditionnelle consistant à utiliser des vêtements usés pour réparer des courtepointes. Les tissus étaient alors découpés en petites bandes, puis tissés de nouveau.
Inspirée par cette découverte, la créatrice a commencé à envoyer ces chutes de tissus dans un village du Guizhou, où des personnes âgées se sont engagées à les tisser. À cette époque, le village était si pauvre que ses habitants considéraient ces petites chutes de tissus comme de précieux trésors.
L’aventure a ainsi commencé. Les villageoises utilisent des techniques ancestrales adaptées pour tisser les chutes de tissus et recréer une grande variété de textiles. Ensuite, Heyaner reprend ses tissus pour fabriquer des vêtements et des accessoires.
Dans le but de mettre en place un système circulaire, la créatrice a lancé sa deuxième marque Mengjinongga qui est étroitement liée à sa première marque B-Y-B-Y.
En fait, les chutes de tissus de la marque B-Y-B-Y sont tissées pour être réutilisées comme matière première dans la fabrication des textiles de la marque Mengjinongga. Les bénéfices générés par la marque B-Y-B-Y sont également investis pour soutenir la marque Mengjinongga.
Cette approche ingénieuse a permis de créer un micro-écosystème équilibré qui contribue à la préservation des traditions artisanales locales tout en donnant une nouvelle vie aux chutes de tissus.
Ce processus fonctionne dans une véritable économie circulaire, où les ressources sont réutilisées et valorisées à chaque étape. De plus, cette collaboration offre aux femmes du village chinois l’opportunité de générer des revenus grâce à leur participation à ce projet.
Dans un esprit libre …
La production de vêtements est bien plus qu’un simple processus, c’est une façon de vivre. La liberté est essentielle, et elle se reflète dans la conception, l’utilisation des matériaux, le processus de fabrication et les choix de vente.
Dans l’atelier de Heyaner, chaque travailleur a la possibilité d’incorporer sa propre vision de beauté dans chaque vêtement qu’il fabrique. Ainsi, chaque pièce véhicule un esprit de spontanéité.
La liberté dans la fabrication des vêtements crée un environnement où l’intelligence humaine est célébrée, et où chacun peut contribuer à sa manière à la création de chaque pièce unique. Cette approche unique permet de partager une expérience de bien-être tant pour la créatrice, les artisans que pour les clients, créant ainsi une véritable connexion entre eux.
Quand le temps s’arrête !
Le vêtement n’est plus soumis aux saisons. Il est conçu comme un « intemporel », imprégné d’un sens infini de partage.
Chaque client devient le gardien de son vêtement et un savoir-faire ancestral, le conservant à vie. Cette approche « hors du temps » permet également aux vêtements de conserver leur valeur esthétique. Ainsi, ils se distinguent des tendances changeantes de l’industrie de la mode, tout en offrant une alternative durable.
Comment fonctionnez-vous ?
Le fonctionnement de notre structure n’est pas centralisé. Dans la région du Guizhou, nous disposons seulement d’un entrepôt et d’un petit atelier. Tous les tissus sont envoyés au village et récupérés régulièrement à l’atelier.
Nous avons fait le choix de produire des vêtements en petite quantité et de ne pas adopter une approche industrielle. Notre atelier se concentre sur la confection de vêtements, avec seulement quelques pièces par modèle en une seule taille, ce qui permet de réduire la production.
Nous n’avons pas énormément de boutiques car notre atelier ne pourrait fournir suffisamment de produits. Actuellement, la quantité de notre approvisionnement convient aux trois magasins.
Nous veillons également à minimiser les déchets des tissus. Lorsque nous donnons des chutes aux artisans du village, ceux-ci sont utilisés de manière minutieuse en tirant parti de tout. Cela crée un équilibre parfait entre la production et l’utilisation des matériaux, ce qui réduit le gaspillage.
Les produits fabriqués sont tissés à la main, ils ne sont aussi parfois plus épais donc pas facilement découpés. Tout cela prend du temps et c’est ce qui explique qu’ils soient légèrement plus chers. Les créations que nous réalisons avec ces tissus s’apprécient par nos clients et c’est ce qui fait notre bonheur !
Est-ce rentable ?
Mon but n’est pas de gagner de l’argent. J’espère utiliser les chutes de tissu pour créer un produit que les gens aiment. Ce processus de production n’est pas facile. Je ne m’attends pas à ce que cette activité me rapporte un revenu élevé en raison d’un coût élevé.
Je ne suis donc pas vraiment dans la recherche de gains financiers. Ma vie est très simple et je consomme au minimum. Je n’achète rien de luxueux.
Votre objectif est d’aider les gens d’un village ?
Je ne pense pas faire la charité ! Ma motivation n’est pas « philanthropique ». J’aime ces chutes de tissus et je cherche à les réutiliser. Dans cette relation de soutien mutuel, j’apprécie cette connexion. Ces villageoises ont un revenu tout en m’aidant à réaliser mon objectif. Ma motivation n’a absolument rien à voir avec la lutte contre la pauvreté.
Ma motivation est simple : je pense qu’il est dommage de jeter ces tissus alors que d’autres pourraient les réutiliser. Notre relation repose sur un échange égalitaire. Mon objectif est de trouver des solutions pour réutiliser les chutes de mes tissus. Il s’agit d’une pratique purement destinée à satisfaire mes choix personnelles. Tout simplement, je ne peux pas accepter de jeter ces bouts de tissus de quelque manière que ce soit, car pour moi, ce ne sont pas des déchets, mais des matériaux précieux !
Rédaction : Xiawen et Hervé
Version chinoise:
https://mp.weixin.qq.com/s/kdgQwFc1O4nPJXxrf4cMCg
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