Jérôme Blin est un couturier « inclassable » comme il se définit lui-même sur son Instagram.
Passionné de couture, une passion inspirante léguée par sa maman, couturière de métier, ce fut aussi une passion contrariée. Pour les parents de Jérôme, en effet, « la couture, ce n’est pas un métier pour les garçons ».
Jérôme va donc étudier les Arts Plastiques, « c’était une façon d’entrer dans le monde de l’artisanat qui m’attirait » dira-t-il. Pour gagner sa vie, il devient fleuriste. Il en fera d’ailleurs un métier puisqu’il passe son CAP de fleuriste et ouvre sa première boutique à Dinard en 1999. Jérôme a alors 25 ans.
Mas le monde de la mode le rattrape. Invité à l’occasion d’un salon du vêtement, il crée un médaillon à la colle à chaux sur un morceau de dentelle. Cet objet de promotion innovant pour le salon va devenir l’élément fondateur qui va propulser une nouvelle fois, le jeune créateur dans le monde de la mode.
Il est invité l’année suivante au même salon, mais cette fois c’est une collection de vêtements qui lui est demandé. C’est un succès. Les sollicitations s’enchaînent : les clientes américaines ou chinoises sont séduites. Les commandes affluent. Mais ce n’est pas encore le moment. Jérôme n’est pas encore structuré pour créer son propre atelier.
Il lui faudra attendre 2014, vivre de nouvelles expériences, accepter réussites et désillusions, pour qu’il décide de se lancer enfin dans le seul univers qui l’attire, la mode. Il ouvre son propre show-room sur l’Ile Saint Louis où il vit et réalise ce qui est sa vocation depuis toujours, des vêtements hors mode, hors du temps, uniques et artistiques où la matière devient un complément indispensable au tissu. Dans le même temps il assoit sa légitimité dans la profession, en suivant en 2013, une formation «couture » à l’IFM
Aujourd’hui, Jérôme a la sérénité de celui qui sait où il va. Il lui faut maintenant développer son nom, faire de son style un style unique, repérable, et surtout recruter une équipe « j’aimerais pouvoir me libérer l’esprit de tout ce qui est administratif, y compris la promotion et le marketing » dit-il des étapes indispensables dans un univers souvent, sélectif et clanique. »
Les gammes de vêtements que vous créez sont à la fois très sophistiquées et très personnelles. Comment vous définissez –vous dans le domaine de la mode ?
Comme le dit mon instagram je me considère d’ abord comme un artisan d’art et un artiste, car je ne suis ni un styliste ni un couturier. Mes lieux favoris d’exposition sont les galeries d’art. Toutefois, si l’on veut me ranger dans la catégorie couture, je dirais que je suis un couturier inclassable faussement sage, instinctif, et rêveur.
Comment estimez-vous votre positionnement par rapport aux grandes maisons de couture ?
Je n’ai pas la prétention de me mesurer à elles. Ce sont des géants qui font partie du patrimoine français et qui suscitent un vrai engouement en créant des gammes de modèles disponibles en France et à l’étranger. En ce qui me concerne, J’ai une autre conception de la couture. Je ne fais que des modèles uniques, sur mesure car c’est le vêtement qui m’intéresse. .Je les appelle mes « fulgurances »
Mais cette politique de la taille unique peut être parfois réducteur, et vous faire perdre des clients ?
Effectivement, la contrepartie est donc d’être à l’écoute de mes clientes. Je les oriente, les accompagne dans leur choix, je les guide sur des modèles qui leur conviennent. J’aime redonner aux femmes que j’habille, l’envie d’être belle. Les sentir reprendre confiance en soi, elles qui ont peut-être été meurtries par la vie, me rend tout à fait heureux. Quand l’une d’entre elles me dit « Jérôme, je peux de nouveau grâce à vous, me regarder dans un miroir » je suis le plus heureux des hommes.
Je vois un autre inconvénient à cette politique de la taille unique. Vous devez vous coupez de certaines clientes qui ne correspondent pas à vos normes ?
Sans doute. Je suis conscient qu’il faudrait élargir mon public. Mais réaliser plusieurs modèles dans plusieurs tailles prend du temps. Enfin, le modèle unique est une façon d’apporter une attention particulière au « vêtement ». Chacun doit se l’approprier à sa façon, le créateur en le dessinant et la cliente en le portant. Chez les grands créateurs, en revanche, on recherche davantage une histoire, un nom, une image.
Reconnaissez-vous certaines influences dans votre style ?
Oui, surtout chez les grands noms de la mode comme Christian Dior, ou encore Alexander Mac Queen ou encore Jean Paul Gauthier.
Comment voyez-vous le monde de la mode dans le futur ?
Je pense qu’il sera binaire. Il y aura d’un côté la mode sportswear, et de l’autre, la mode « couture » pour celles qui voudront s’habiller
Pensez-vous que les enjeux environnementaux concernent aussi la mode ?
Bien sûr, mais pour le moment, je n’ai pas envisagé de démarche particulière même si je sais que la problématique existe. Le sujet est vaste, entre l’évolution des tissus moins gourmands en eau, et surtout plus respectueux de la biodiversité, les réflexions autour de l’ anti-gaspillage avec la récupération des chutes de tissus, et enfin la question des polluants dans les teintures, je me sens totalement concerné. D’ailleurs, je suis preneur de toute information pour m’investir davantage. Je pense qu’une formation globale liée aux bonnes pratiques qui serait proposée au monde de la couture serait bienvenue. C’est tout un nouvel univers qui s’ouvre à nous.
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